Sommaire de la campagne archéologique de 1986
par
Jean-Luc Pilon
Archéologue du PIPGN
Musée canadien des civilisations

Résumé des activités effectués en 1986

En cette deuxième saison d'activités du projet archéologique du PIPGN, Commission archéologique du Canada, Musée canadien des civilisations, on est retourné sur 5 sites découverts en 1985 afin d'y recueillir des données additionnelles et on a découvert 18 nouveaux sites archéologiques dans le sud-ouest de la plaine d'Anderson. Sur quatre des 5 sites découverts en 1985, nous avons trouvé des maisons semi-souterraines. On a découvert deux autres habitations de ce genre sur un des nouveaux sites. Les autres sites se caractérisent par des restes fauniques et des déchets de taille de la pierre, entourant des traces de combustion. À notre avis, ces sites remontent à la période préhistorique récente. En effet, l'étude des données se rapportant à cette période pourrait bientôt permettre une synthèse préliminaire des modes d'exploitation de la région.

Objectifs

Les activités archéologiques prévues pour la saison 1986 avaient comme objectif premier d'accroître nos connaissances relatives à l'occupation du sud-ouest de la plaine de la rivière Anderson. Suite à nos recherches sur le terrain en 1985 (Pilon 1985), ainsi que des reconnaissances antérieures (Cinq-Mars 1975; Millar et Fedirchuk 1975; Morrison 1984), nous disposions d'une banque de données considérable mais qui présentait néanmoins plusieurs lacunes importantes concernant l'utilisation du territoire.

En continuant nos travaux dans le sud-ouest de la plaine d'Anderson, nous nous étions fixés des buts précis. Tout d'abord, nous voulions vérifier et augmenter nos observations relatives à certains sites découverts en 1985. Endeuxième lieu, nous espérions compléter notre échantillonnage degisements en effectuant des reconnaissances additionnelles, surtout dans les parties qui, faisant partie de la région à l'étude, n'avaient pas encore été examinées: la vallée de la rivière Thunder, la région du lac Whirl et les environs de la ville d'Inuvik. Enfin, nous voulions tenter d'obtenir une meilleur compréhension de l'utilisation du fleuve Mackenzie aux temps préhistoriques. Une telle démarche était nécessaire surtout à cause d'une opinion qui veut que ce fleuve ait été une "River to Nowhere?" (Clark 1983) (littéralement une rivière menant nulle part). Pour ce faire, nous avons décidé d'effectuer une reconnaissance du Mackenzie entre Arctic Red River et l'embouchure de la rivière Thunder, et de tenter de redécouvrir le site déjà découvert par MacNeish (1953) à Arctic Red River, ainsi que l'évaluation de son état.

Itinéraire

L'équipe se composait de quatre personnes: Jane Dale (Commission archéologique du Canada), Cathy Yasui (Université de Toronto), Verna Mae Firth (étudiante au secondaire d'Aklavik) et moi-même. Nos déplacements principaux, d'un lac à l'autre, se sont faits en hydravion tandis que nous avons parcouru les lacs en bateau pneumatique ZODIAC. La reconnaissance du fleuve Mackenzie fut entreprise en "river scow" (bateau à fond plat typique de la région) appartenant à Monsieur Gabriel Andre.

Nous sommes arrivés à Inuvik le 16 juin 1986 et nous y avons passé quelques jours à préparer notre équipement et à faire les achats de vivres nécessaires à un séjour d'environ deux semaines au lac à la Truite.

Un premier vol au lac a eu lieu le 19 juin en Cessna 206. Nous voulions installé notre camp de base au rétrécissement de la partie occidentale du lac. En y arrivant, nous nous sommes rapidement rendu compte que la saison n'était pas aussi avancée que ne l'indiquait la température ambiante; la glace recouvrait encore plus des trois quarts de la surface du lac! Nous avons pu nous poser sur une étendue d'eau dans le détroit, en face du camp projeté. Cependant, cet amerrissage brisa la glace qui remplit rapidement la voie d'eau ouverte derrière nous. Une fois libéré de notre charge, nous avons tenté à trois reprises de quitter le lac, mais sans succès. Il a fallu se frayer un chemin lentement à travers la glace. Enfin, nous avons réussi à décoller de la surface du lac. Le chemin qu'on s'était fait était plutôt court pour le décollage et il a fallu manoeuvrer avec beaucoup d'habileté après notre envol pour éviter les épinettes qui poussaient sur le rivage. Il va sans dire que nous ne sommes pas retournés au lac avant le lendemain.

Nous sommes restés à notre camp au détroit ouest jusqu'au 29 juin. A partir de cette localité, nous avons effectué des travaux aux sites MlTk-2, MlTk-3, MlTk-4 et découvert trois autres sites (MlTk-6, MlTk-7, MlTk-8).

Le déménagement sur la pointe au milieu du lac à la Truite pour établir notre second camp de base s'est fait les 29 et 30 juin, en remorquant avec le ZODIAC le bateau pneumatique AVON, rempli de bagages et d'équipement. Il a fallu trois voyages pour compléter cette opération.

Nous avons travaillé aux sites MlTj-2 et MlTj-3 à partir de ce camp de base jusqu'au 9 juillet. A cette date, notre équipement fut transporté au lac Whirl par hydravion tandis que l'équipe rentra à Inuvik. On s'est rendu en camion au village d'Arctic Red River et de Fort MacPherson. Là, nous rencontrâmes des représentants des conseils de bande afin de les informer de nos activités et des résultats obtenus à date. De plus, nous leur avons remis des panneaux qui décrivent et illustrent la première année des activités archéologiques du PIPGN.

Outre ce travail de relations publiques, nous avons aussi entrepris la reconnaissance d'une partie des collines Dolomite, du côté ouest du lac Campbell.

Le 14 juillet nous avons installé notre camp au lac Whirl. Nous voulions faire la reconnaissance de ce lac ainsi que le lac en amont, le lac Fishing Bear, et celui en aval, le lac Attoe. Il n'a pas été possible d'atteindre ce dernier en raison des eaux peu profondes le reliant au lac Whirl. Nous avons donc quitté l'endroit le 19 juillet afin de nous préparer pour la reconnaissance du fleuve Mackenzie. Notre équipement fut entreposé à Arctic Red River (chez Monsieur Colin Webster, gérant du magasin de la Bande), puis nous nous sommes rendus à Inuvik avec l'équipement qui n'était pas essentiel au travail sur la rivière. Retournant à Arctic Red River en camion, nous avons engagé Monsieur Gabriel André pour nous servir de guide. Quittant le village le 22 juillet, nous avons été obligés d'abandonnér à moitié chemin en raison d'un problème de hors-bord.

Nous avons effectué des sondages dans le village d'Arctic Red River les 28 et 29 juillet pour finalement revenir à Inuvik le soir du 29. Pendant les jours suivants, jusqu'au 3 août, nous nous sommes occupés à effectuer des reconnaissances dans les environs d'Inuvik et à préparer l'équipement pour son entreposage au Centre de Recherche d'Inuvik ou pour son expédition à Hull.

Remerciements

Travaillant dans la même région des Territoires du Nord-Ouest que l'été dernier, j'ai eu le plaisir de renouveler des amitiés et d'en établir des nouvelles. En particulier, je suis reconnaissant à Monsieur John Ostrick du Centre de recherches scientifiques d'Inuvik pour sa gentillesse. Il est toujours prêt à accommoder les chercheurs qui sont parfois un peu insouciants quant aux heures de travail des autres. Fred et Mickie Carmichael, ainsi que les pilotes d'Antler Aviation ont tout fait pour faciliter nos déplacements sur le terrain.

À Arctic Red River, l'accueil de Monsieur Colin Webster, gérant du magasin de la Bande, porte le flambeau d'une ancienne tradition d'hospitalité écossaise dans le Nord canadien. Monsieur Walter Firth partagea volontiers ses connaissances de la région, connaissances qu'il tient de son expérience à titre de trappeur, gérant de magasin de la Compagnie de la baie d'Hudson, pilote, annonceur de radio, membre élu au parlement canadien, photographe amateur et maintenant administrateur de la Bande d'Arctic Red River.

La communauté d'Arctic Red River nous a accueillis chaleureusement et nous a offert toute l'aide possible. Je remercie tout particulièrement les personnes nommées ci-après: Madame Grace Blake (chef de la bande), Soeur Matte, Monsieur Gabriel André, Monsieur Hyacinthe André.

Cette été, j'ai travaillé avec la même équipe de terrain que l'an passé: Jane Dale, Cathy Yasui et Verna Mae Firth. Cathy eut l'occasion de développer son niveau d'expertise en assumant la direction du travail à MlTj-3. Ses observations ainsi que ses notes facilitèrent grandement la synthèse des données provenant de ce site tout en attestent du succès de son apprentissage. Jane Dale eut la responsabilité particulière de notre équipement et de nos vivres. Elle oeuvra dans des conditions parfois peu enviables, mais réussit à nous régaler de repas toujours hors de l'ordinaire et s'assura que jamais rien ne nous manquât. Verna Mae Firth a conservé un intérêt tout particulier pour le travail archéologique. En outre, elle aime toujours la pêche et les cartes!!

Rédiger un rapport de terrain en français devrait être, pour une personne bilingue, un travail normal. Cependant, le bilinguisme existe à plusieurs niveaux, dont certains n'ont pas encore été reconnus par la Commission de la fonction publique. Ainsi, j'ai eu recours à la gentillesse de mes collègues francophones à la Commission archéologique du Canada; Lucie Johanis et Jacques Cinq-Mars. Lucie révisa la section décrivant le canot d'écorce du site MlTj-2, tandis que Jacques entreprit la correction du texte entier, une tâche onéreuse! J'assume, cependant, toute responsabilité pour les erreurs et difficultés qui peuvent encore s'y trouver.

Enfin, je tiens à remercier mes collègues Jacques Cinq-Mars et Raymond LeBlanc pour l'aide et le soutien qu'ils m'ont apportés au cours de l'année.